« Agatha All Along » : pas de controverse, que de la qualité
Critique

« Agatha All Along » : pas de controverse, que de la qualité

Marvel paraît enfin libéré avec « Agatha All Along ». Exit les super-héros génériques et la diversité artificielle, place à un récit sombre et complexe aux rebondissements surprenants avec des personnages féminins forts.

Attention : cet article contient des spoilers sur *WandaVision, Doctor Strange in the Multiverse of Madness et Agatha All Along. Ces derniers sont masqués dans des encadrés à déplier pour permettre aux personnes qui veulent regarder la série de lire l’article sans crainte.*

À chaque fois que les studios Marvel font une nouvelle série télé live action, les dieux des séries lancent une pièce : pile, une histoire captivante et riche, face, des effets spéciaux moyens et des personnages bancals. Hélas, ces dernières années, la pièce est manifestement beaucoup tombée du côté face.

Si la deuxième saison de Loki nous a donné un peu d’espoir, Echo était barbante à souhait et Secret Invasion une bouse déguisée en thriller. Moon Knight et Miss Marvel avaient bien commencé avant de s’échouer lamentablement entre divinités animales géantes et batailles de paillettes multicolores contre des djinns, comme l’écrit si élégamment Sören Diedrich de Gamestar. Et ne parlons pas She-Hulk...

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    par Luca Fontana

Le studio, qui appartient à Disney depuis 2009 et a enchaîné les blockbusters de super-héros entre 2010 et 2019, semble ne plus savoir écrire que des personnages superficiels, des gags forcés dignes de Disney Channel et des messages politiques inutiles.

Le vent aurait-il enfin tourné ?

Bien plus qu’un divertissement familial

J’osais à peine y croire, mais la pièce est enfin tombée sur pile avec Agatha All Along et je ne suis pas le seul à être de cet avis. Sur Rottentomatoes (une base de données compilant les critiques de films), la série obtient par exemple 83 % d’approbation, tant de la part du public que des critiques professionnels, soit plus que la deuxième saison de Loki.

Ça veut tout dire !

La merveilleuse Kathryn Hahn vole de nouveau la vedette à tout le monde dans le rôle d’Agatha.
La merveilleuse Kathryn Hahn vole de nouveau la vedette à tout le monde dans le rôle d’Agatha.
Source : Marvel / Disney+

L’histoire commence de manière relativement simpliste. Trois ans se sont écoulés depuis que Wanda Maximoff (Elizabeth Olsen), la Sorcière rouge, a privé Agatha Harkness (Kathryn Hahn) de ses pouvoirs et l’a emprisonnée dans un univers factice pour mettre un terme définitif à ses agissements maléfiques. Mais la mort de Wanda dans Doctor Strange in the Multiverse of Madness a fragilisé la prison d’Agatha, juste assez pour qu’un étrange adolescent (Joe Locke) s’y introduise et l’en libère.

Ensemble, ils doivent réunir un sabbat de sorcières pour accéder à la légendaire « Route des Sorcières ». Une ballade, servant à la fois de mode d’emploi et d’avertissement, promet en effet gloire et puissance aux personnes survivant aux ruses et aux épreuves parsemant le chemin.

Voilà qui sonne aussi captivant que stressant et qui tombe à pic pour la période d’Halloween. L’inquiétude de voir cette histoire gâchée est grande, surtout lorsqu’on pense qu’elle est diffusée sur Disney+, le service de streaming de Disney à l’orientation plutôt familiale et a priori peu compatible avec les histoires d’horreur.

Qu’on ne dise plus que l’horreur n’a pas sa place sur Disney.
Qu’on ne dise plus que l’horreur n’a pas sa place sur Disney.
Source : Marvel / Disney+

On retrouve donc un sabbat de sorcières (la bête noire de Disney depuis [« The power of maaaany! »])(/page/hoert-bitte-mit-diesem-disney-zerstoert-star-wars-gerede-auf-33589), tout comme les personnages principaux queer et les relations homosexuelles d’ailleurs. Ce ne serait pas la première fois que Disney ajoute ce genre de thématiques à l’histoire pour pouvoir se vanter de sa supériorité morale, sans que cela ait du sens ou soit nécessaire à l’intrigue. Il suffit de voir Avalonia, l’étrange voyage... Je m’attendais donc au pire avant le visionnage.

Et j’avais tort !

Les choses deviennent plus sombres à la moitié de la saison et un rebondissement en cache un autre

Neuf épisodes plus tard, force est de constater qu’Agatha All Along n’est jamais aussi mollassonne ou politique que je le craignais, bien au contraire. La série est vraiment bonne, même si elle n’est pas parfaite.

Après quatre épisodes, mon collègue Patrick Vogt et moi-même avons critiqué lors d’une pause café les moments d’horreur d’Agatha All Along, comme quand les Sept de Salem se lancent à la poursuite de la petite troupe, le corps déformé et la bouche débordant d’araignées, d’asticots et de vers. Hélas, l’humour enfantin caractéristique de Marvel continue d’interrompre inutilement le ton sombre nouvellement adopté.

Argh !

Toujours de très belles images, mais un peu trop d’humour Marvel dans la première moitié de saison.
Toujours de très belles images, mais un peu trop d’humour Marvel dans la première moitié de saison.
Source : Marvel / Disney+

Mais au milieu de la saison, l’histoire de la scénariste de WandaVision et showrunneuse d’Agatha All Along Jac Schaeffer s’emballe. Pas de concessions, le ton vire au dramatique et même au tragique avec la mort de plusieurs personnages. C’était précisément la mise en garde de la ballade : on paie de sa vie tout échec aux épreuves. D’autres reviennent à la vie de façon douce-amère, mais je n’en dirai pas plus.

Sans compter les rebondissements que même moi, fan de série et vétéran des comics Marvel, n’ai pas vu venir. L’un d’entre eux m’a carrément donné envie de recommencer la série depuis le début pour débusquer les indices subtilement cachés. Indices qui paraissent soudain tellement évidents que je me demande comment je suis passé à côté... C’est ça qu’on veut !

C’est comme si Marvel avait lu mon analyse de ce qui ne fonctionnait pas dans le MCU et avait pris des notes. L’humour à la Disney Channel s’estompe puis s’évanouit totalement, comme mon ressenti que Marvel vise un public de plus en plus jeune. D’ailleurs, l’intrigue se révèle bien plus intelligente dans la deuxième moitié de saison que je ne l’aurais cru. Les nouveaux personnages sont (enfin) bien plus que de simples ambassadeurs là pour faire de la pub au prochain film ou à la prochaine série. Je suis investi dans l’histoire et leurs destinées ne me laissent pas indifférent.

Finalement, je me suis attaché à presque tous les personnages et je ne me lasse pas d’eux.
Finalement, je me suis attaché à presque tous les personnages et je ne me lasse pas d’eux.
Source : Marvel / Disney+

Qui l’eût cru ? Marvel n’est pas un cas désespéré. Et ce, malgré l’évocation de sujets controversés qui provoquent des torrents de haine et rage baiting chez les fans et dans les discussions hélas de plus en plus toxiques d’Internet. Ce n’est pas autant le cas avec Agatha All Along : la création de Jac Schaeffer est unique, fraîche et inédite, bien loin de l’exubérance du multivers. Les avis sur la plupart des portails de critiques sont dithyrambiques et c’est mérité.

Bilan

On dit oui !

Enfin une série Marvel live action qui tient ses promesses jusqu’au bout, bravo !

Ça fonctionne parce qu’Agatha All Along mise sur des personnages auxquels on s’attache rapidement et sur une intrigue qui renferme tant de surprises qu’on a envie de tout reprendre depuis le début. Et tout ça, avec un budget ultra-modeste de seulement 40 millions de dollars. Agatha All Along est plus belle, plus authentique et surtout plus vraie que la très décevante Secret Invasion et son budget de 225 millions de dollars. Pas mal.

Agatha All Along prouve avec brio que les femmes et les minorités peuvent être les figures de proue d’un projet réussi. Ces derniers temps, Marvel ne souffrait pas tant de « wokeness » que d’une piètre écriture. Mais c’est loin d’être le cas d’Agatha All Along.

Photo d’en-tête : «Agatha All Along» / Marvel / Disney+

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Vivre des aventures et faire du sport dans la nature et me pousser jusqu’à ce que les battements du cœur deviennent mon rythme – voilà ma zone de confort. Je profite aussi des moments de calme avec un bon livre sur des intrigues dangereuses et des assassins de roi. Parfois, je m’exalte de musiques de film durant plusieurs minutes. Cela est certainement dû à ma passion pour le cinéma. Ce que j’ai toujours voulu dire: «Je s’appelle Groot.» 


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